Être infirmière en situation de handicap : une intégration difficile

Surdité totale, malvoyance, infirmité : le handicap lourd, la plupart du temps considéré comme incompatible avec les métiers sanitaires et sociaux, a pourtant sa place au sein de la communauté infirmière. Éclairage sur ces soignants de l’ombre, qui malgré un niveau identique ont souvent un parcours semé d’embûches.

« Des bâtons dans les roues », malgré certains atouts 

« Lorsque j’ai déposé un dossier de candidature en mentionnant mon handicap, pour un poste vacant dans un service de psychiatrie, je n’ai pas été retenue, ni même convoquée. Mon dossier avait été mis de côté. Il est clair que ma situation gênait l’administration ».

Eva a 26 ans. Infirme motrice cérébrale depuis sa naissance, elle « marche bizarrement » et souffre de troubles de la coordination et de l’équilibre. Cela ne l’a pas empêché de réussir brillamment son D.E et de faire ses preuves, « sans jamais un rattrapage, et souvent avec des appréciations positives en stage ».

Pourtant, et alors que le marché de l’emploi est plutôt favorable aux infirmières, il lui a fallu plus de 6 mois pour qu’un établissement de soins accepte de l’intégrer. « J’ai même essayé l’intérim. Lorsque l’on me voyait arriver, on me demandait ce que je faisais là et l’on me faisait comprendre que l’on ne me confierait pas de mission. Je venais d’effectuer 3 ans et demi d’études avec toutes les visites médicales d’aptitude qui vont avec et là, tout s’effondrait » se souvient la jeune femme.

Brillante et déterminée, elle travaille à présent à Montpellier, dans un centre médico-éducatif pour enfants polyhandicapés. « Je connais mes limites. Je sais où je peux aller et où je ne peux pas aller. Évidemment, je ne postulerai jamais dans des services d’urgences ou de réanimation, car je gênerais plus qu’autre chose. Néanmoins, j’estime vraiment avoir ma place parmi les soignants » explique Eva.

Une place particulière qui peut aussi représenter une véritable valeur ajoutée avec des compétences uniques. « Il y a plein de problèmes dont j’ai peut-être plus conscience que les autres, par exemple en matière  d’attelles et de corsets. Je sais moi-même ce que la contention représente. De ce fait, je peux grâce à mon expérience personnelle et si besoin, guider les parents face à l’attitude à adopter envers leurs enfants », confie Eva.

Des compétences partagées par les quelques soignants en situation de handicap de France, comme Marie Giraud, infirmière atteinte d’une surdité profonde (sourde cophose avec implantations cochléaires), qui travaille au service des urgences de l’hôpital de Corbeil Essonne. Tout comme Eva, elle admet qu’elle a parfois quelques difficultés, notamment en ce qui concerne les conversations téléphoniques ou la prise de tension au stéthoscope. Mais pour elle, pas question de changer de métier.

« Il faut savoir que j'ai plusieurs casquettes en étant sourde. Je maîtrise la Langue des Signes Française et je suis oraliste, c’est-à-dire que je parle comme tout le monde. Du coup, je peux aussi servir d’interprète LSF pour les patients sourds accueillis aux Urgences. Je suis également capable de lire sur les lèvres et cela peut s’avérer très utile pour communiquer avec les patients trachéotomisés, ou affaiblis. La plupart du temps, les gens ne remarquent même pas mon handicap », témoigne-t-elle.

Pourtant bien présent, ce handicap rythme la vie de la jeune femme. Impliquée dans sa propre cause, elle souhaiterait rassembler tous les soignants sourds de France en créant un réseau communautaire. Elle espère aussi se spécialiser en gériatrie et à plus long terme, reprendre des études pour présenter un doctorat sur la prise en charge des personnes âgées sourdes atteintes de la maladie d’Alzheimer.

Les actions d’accompagnement peu généralisées

Hormis les mesures générales en France - la loi oblige les entreprises de plus de 20 salariés à consacrer plus de 6 % de leur masse salariale à l’emploi de travailleurs handicapés -, rien n’est vraiment prévu pour les soignants en situation de handicap. Ces derniers seraient même discriminés parmi les handicapés. « En général, les hôpitaux ne recrutent pas de soignants handicapés, mais plutôt des agents administratifs, car cela semble plus cohérent » explique Jonathan Try, chargé d’un  projet de formation des personnels hospitaliers à l'intégration et au recrutement de travailleurs handicapés pour l’ANFH.

Et si les infirmières en situation de handicap ne représentent qu’une infime partie de la communauté soignante à l’embauche, elles sont de plus en plus nombreuses après quelques années d’exercice. « Les contraintes physiques assez lourdes du métier peuvent entraîner des troubles musculo-squelletiques en milieu de carrière qui conduisent à des handicaps plus ou moins sévères. Cela nécessite des actions de prévention et de reclassement » soulève Jonathan Try.

Quant à la formation initiale, seul le Centre de Rééducation et d'Insertion Professionnelle de Castelnau-le-Lez (34) propose un IFSI pour les personnes reconnues travailleurs handicapés. Ailleurs, l’intégration d’étudiants en situation de handicap se fait au bon vouloir des établissements.

Malika Surbled

 

SOURCE : http://www.actusoins.com/11850/etre-infirmiere-en-situation-de-hand...

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